• Je scinde, parce que ça fait un pavé indigeste, ce coup-là, mon automne fait figure de micro-jupe, à côté de ça !

    Vous ne trouvez pas fabuleux, vous, l’avènement de l’informatique et de l’Internet ?

    Réfléchissons.

    Tout d’abord, l’écriture

    Parlons de ce qui fâche, dès le début, la compta, tiens.. Je garde un souvenir ému des grands livres comptables, avec les lignes et les colonnes interminables, à additionner, vérifier, pointer, et zut, il y a une erreur d’un centime. Interdit, le blanco, tu rayes ta ligne, proprement, tu refais une nouvelle ligne, tu refais tes totaux, tu tournes la page, tu réécris tes reports………… brrrrrrrr .

    Tu tapes un rapport de 10 pages, en 3 exemplaires… en avant, le carbone, et zut, la faute de frappe, blancoter la 1ere page, soulever le carbone, blancoter derrière et rester 3 minutes avec papier et carbone intercalés entre les doigts en attendant que ça sèche, avec ton chef de service derrière toi, qui fait les 100 pas : « alors, Croc, ça vient ? »

    J’ai toujours été une grande « écrivassière ». Il y a quelques années, entretenir une correspondance, était toute une affaire : papier, stylos, enveloppes, timbres….. Ecrire sa lettre, se tromper, raturer, ou recommencer, ou pondre un brouillon, à recopier, ensuite, pour s’apercevoir à la fin que l’on a oublié un mot, ou mieux, une phrase entière. Et on recommence…………….

    Et vive, maintenant, les traitements de texte, merci Word et les open source !

    Ensuite on poste, on compte 2 ou 3 jours, pour qu’il arrive, puis une semaine avant de commencer à guetter le facteur, pour la réponse. Voire plus, si le correspondant est au Canada, en Allemagne, en Roumanie……….

    Heureusement, à cette époque, la poste était fiable. Le courrier arrivait toujours …

    Maintenant, tu es en France, tu corresponds en temps pratiquement réel avec le Japon, la Chine, Madagascar. Parlant de Madagascar, s’il y a bien une Paositra, le courrier est fantaisiste : il arrive ou n’arrive pas. Comme, de plus, il n’y a ni facteur, ni boites aux lettres, tu es dans l’obligation de louer une boite postale, et de faire 25 km dans la poussière pour aller chercher les lettres tant attendues, expédiées de France, tu le sais, mais jamais arrivées……………

    Grâce aux mails, et aux blogs, j’ai ainsi pu rester en contact avec mes enfants, voir grandir ma petite-fille en photos…..



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  • Notre belle société a vite fait de généraliser, à partir d'un malheureux fait divers. Ou en se contentant de répéter, bêtement, ce qu'on entend dire.

    Exemples :

    Deux jeunes beurs braquent une épicerie : tous les arabes sont des malfaiteurs en puissance (pardon, belle-soeur, désolée).

    Musulmans et Djihad : tous les musulmans sont de dangereux terroristes - je me suis donné la peine de chercher ce que Jihad veut dire au fait , voilà :

    "Le mot « Jihâd » ne signifie pas « guerre sainte ». Il désigne la lutte et l’effort. Les mots utilisés pour la guerre dans le Coran sont « Harb » et « Qitâl ». Le Jihâd quant à lui désigne la lutte sérieuse et sincère aussi bien au niveau individuel qu’au niveau social. C’est la lutte pour accomplir le bien et éradiquer l’injustice, l’oppression et le mal dans son ensemble de la société. Cette lutte doit être aussi bien spirituelle que sociale, économique et politique. Le Jihâd consiste à œuvrer de son mieux pour accomplir le bien. Dans le Coran, ce mot est employé sous ses différentes formes à 33 reprises. Il est souvent associé à d’autres concepts coraniques tels que la foi, le repentir, les actions droites et l’émigration (Hégire) [2].

    Le Jihâd consiste à protéger la foi de l’individu et ses droits. Le Jihâd n’est pas toujours une guerre bien qu’il puisse parfois prendre cette forme. L’Islam est la religion de la paix mais cela ne signifie pas qu’il accepte l’oppression. L’Islam enseigne que l’on doive faire tout notre possible afin d’éliminer les tensions et les conflits. L’Islam promeut les moyens pacifiques pour mener au changement et à la réforme. En réalité, l’Islam insiste sur le fait que l’on doit s’efforcer d’éliminer le mal par des moyens pacifiques sans avoir recours à la force autant que faire se peut. Au cours de l’histoire de l’Islam, depuis le Prophète — paix et bénédiction sur lui — jusqu’à aujourd’hui, les Musulmans ont, le plus souvent, résisté à l’oppression et ont lutté pour la liberté par des moyens pacifiques et non-violents."

    Tous les noirs sont voleurs et jettent des mauvais sorts. On se fout royalement qu'ils soient africains ou antillais. Ils sont noirs, ça suffit.

    Les chinois sont des barbares : ils mangent du chien. Nous, européens civilisés, on mange du cheval, c'est mieux, peut-être?

    Tous les marginaux chevelus sont des drogués. D'abord, rien que le fait d'être chevelu suffit à être catalogué comme marginal. Sauf les artistes, ou certain joueur de rugby. Eux, c'est différent : ils sont célèbres, donc ils échappent à la généralisation.

    Les femmes qui mettent des pantalons en cuir avec des boots à talon sont : soit des putes, soit des putes, ou alors des dominatrices, des putes, donc. (Au fait, je vends un pantalon en cuir noir taille 40 et des boots cuir noir à talons aiguilles, pointure 40, ça intéresse quelqu'un?)

    Les américains sont impérialistes. Tiens, au fait, Einstein, disait " les Etats-Unis d'Amérique forment un pays qui est passé directement de la barbarie à la décadence sans jamais avoir connu la civilisation".

    Tous les cyclistes sont des drogués, les footeux sont pédés, les danseurs sont des tapettes, les homos sont pervers, les zompolitik sont pourris, les bloggeurs sont exhibitionnistes (ouais, lu ça dans un magazine,sur un article pondu par un psychologue au sujet du phénomène montant : les blogs. Je vous passerai les détails des divagations de ce type qui, à mon avis, devrait consulter......... pour livrer l'essentiel. Ce crétin pontifiant déclare que les blogs n'ont rien à voir avec un journal intime, mais relèvent de l'exhibitionnisme!!! Pas un mot au sujet des découvertes des créations, de l'esprit, de l'humour, des bloggeurs, ni des échanges qui se créent!!! Ca me met de bonne humeur, ce genre de truc........):

    Les accros d'internet sont trucassés (pardon, ça c'est du langage local, ça veut dire cinglé), 

    les paysans sentent le fumier et sont sales,

    les anglais sont sournois, les écossais avares, les juifs aussi d'ailleurs,

    les filles libérées sexuellement sont des putes, (mais les garçons, eux, qui couchent autant qu'ils peuvent,  sont admirables, ce sont des don juans, des tombeurs), etc etc.....

    Je continue?  je pourrais, vous savez, j'en ai encore des tonnes comme ça. D'ailleurs je suis sûre que vous aussi, vous pouvez allonger ma liste de généralités............

    Moralité : l'être humain est sans pitié envers qui est différent, envers celui qu'il envie, ou dont il est jaloux ......... et cela depuis la nuit des temps.


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  • Je vous préviens, là, c'est long.

    Puisque l'automne est de rigueur sur la blogosphère, j'avais prévu de faire une dizaine de lignes pour amener la conclusion, puis, comme d'habitude, ça a dérapé, et ce coup-ci, je n'ai pas trouvé où couper pour vous pondre un feuilleton;

    Bon courage

    lisez en musique, ça simplifiera........

    Pour reprendre le terme vu sur un blog ami, il y a quelque temps,  j'arrive à l'automne de ma vie.

    54 ans dans deux mois, je ne suis plus une adolescente.

    Et j'aime mon âge.

    Parce que je peux enfin de permettre de  me prévaloir  de mes cheveux blancs pour ne plus mâcher mes mots, moi qui ai longtemps retenu quelque remarque cinglante ou quelque propos désobligeant, pour ne pas choquer, ou parce que cela aurait été malvenu de la part d'une jeunesse de 30 ans ............

    Parce que je peux fredonner quelque chanson de Trenet, ou entonner à pleine voix, avec l'aide de mon Jules, toujours prêt à me suivre dans un mauvais coup, à pleine voix, donc, le Tango Corse, (et avec l'accent, que Fernandel ne nous renierait pas), sans crainte du ridicule, j'ai passé l'âge. Maintenant on s'attaque aux palétuviers..........essayez je vous le recommande...

    Parce que, jouant du paradoxe, je m'amuse prodigieusement  à mettre en playlist toute une série de rap, commençant par Eminem, en passant par mon chouchou Akhenaton, pour terminer par Diam's, avec un crochet du détour de Afroman, et chanter avec ! Ca, ça choque ! Mais que voulez-vous, j'aime le rap. Et les Garçons Bouchers (un jour j'ai reçu un fax de François Hadji-Lazzaro, en réponse à une lettre que j'avais écrite à Boucherie Prod. Pour râler, bien sûr. Et il finissait par : "et voilà. Je t'écris au lieu de finir l'enregistrement du dernier CD, et il va sortir en retard par ta faute" et il avait fait une caricature de lui avec sa signature. Je l'ai gardé des années, ce fax, et puis, saloperie de papier thermique, il s'est effacé, tout doucement, comme un souvenir), Et les Doors, Pink Floyd et Deep Purple, en même temps que Vassiliu, Le Forestier à ses débuts, Bénabar et Mr Roux, La Callas, Beethoven et Purcell, Gotan Project et Aznavour ou Nougaro et la musique sacrée. Fan de Malicorne et de Charlélie (il m'a écrit aussi, Charlélie, moment de bonheur pur ! Sisisi, c'est vrai, je vous jure !) Faire découvrir David Bowie à de plus jeunes .............. ;

     Bon, tout ça pour dire qu'il n'y a qu'à l'automne d'une vie que l'on peut avoir des goût aussi variés et étendus  ; je parle de goûts, pas de culture, n'est-ce pas............

    Parce que ça m'amuse de voir le regard de certaines bonnes femmes, de mon âge et de ma génération, qui part de la pointe de mes cheveux, hérissés dans tous les sens (ben oui, courts, c'est bien, mais j'ai gardé de mes tresses la manie de fourrager dans ma tignasse sans me préoccuper des conséquences,)  détailler mon visage sans maquillage aucun (le seul soin que je m'accorde, et que je ne rate pas, c'est de m'enduire soigneusement après chaque douche, d'une huile de coprah à la cannelle et au rhus toxicodendron (sumac africain)., qui , en plus d'avoir des vertus anti-inflammatoires , répand un merveilleux parfum d'épices et fait une peau brillante et satinée), détailler le collier et le bracelet de graines de baobab et de coquillages,  détailler la jupe de baroudeuse, descendre le long du caleçon - ah pardon, on dit leggins maintenant, pour terminer sur la pointe de mes baskets éculés ; regard choqué, scandalisé, amusé. De ce regard nait une relation cordiale ou assez pincée.... Je n'ai jamais été et ne serai jamais, c'est trop tard, maintenant, BCBG.

    Mais je m'égare ...............

    J'en étais où ? Ah oui

    Parce que, j'ai assez galéré pendant une longue partie de ma vie, pour apprécier pleinement le fait de vivre, de respirer, de marcher sur la plage, de jouer avec mes chiens, de regarder autour de moi, et de goûter pleinement le bonheur d'exister, avec mon foutu caractère, mes zhumeurs, mes zenvies, mes joies, mes colères, mes souvenirs, les bons, vivaces, les moins bons, gommés, flous, il en reste une impression fugace de mal-être, mais les mauvais passages ont permis un rebond dans une autre direction ............ de savourer le bonheur d'exister, tout simplement, et de m'être donné la chance d'avoir pu, enfin, réaliser un vieux rêve de jeunesse : vivre au soleil et au bord de la mer, ne plus avoir froid .......... (je peux vous dire que le retour, par contre, aglagla)

    Parce que j'ai attendu d'avoir 48 ans pour enfin rencontrer un homme qui me ressemble, qui me fait rire, qui me fait rêver, qui m'écoute, et enfin, pour paraphraser Verlaine, qui m'aime et me comprend. Depuis plus de 6 ans. Et réciproquement.

    Bref, j'aime mon âge.

    Sauf que .

    Sauf que, je hais la gymnastique que je suis obligée de faire devant mon PC : mettre mes lunettes pour voir le clavier, les poser pour regarder l'écran, tenir à bout de bras sous la lumière le bout de papier ou le bouquin sur - ou dans - lequel j'ai noté tel passage que je destine à un billet (et plus ça va, moins mes bras sont assez longs), Les verres progressifs, me direz-vous ? Oui, bien sûr. Sauf que ça fait belle lurette que je les ai perdues, ces lunettes là. Dans le genre , il ne me reste que les verres solaires, pas vraiment pratique pour écrire, la nuit, quand la horde est enfin pieutée .......... Bref ma vue baisse de façon dramatique.

    Dans ce cas précis, l'automne m'emmerde prodigieusement !



    22 commentaires

  • Ben  oui, je fume ! Comme un pompier!
    J'ai décidé qu'à mon âge, j'étais assez grande pour décider de quoi j'allais mourir.
    Je ne drague pas, ne vais pas en boite, ne bois pas (d'abord le vin ça me saoûle, sauf le Vino Verde mais ça coûte la peau du cul des fesses, et le rhum blanc, c'est pas tous les jours, quand même)je ne suis pas la mode, je vais même à contre courant, et c'est pas mon séjour malgache qui a arrangé les choses (je ne supporte plus les chaussures, cale mes pieds palmés dans des baskets de 5 ans d'âge, parce que même les neuves, ben non, ça coince, j'ai récupéré dans des cartons chez mes enfants les quelques vêtements que j'avais laissés en partant) alors je  faut quand même bien que j'ai un vice avoué ........
    Mon père, non fumeur, est mort d'un cancer du poumon, alors moi je rétablis l'équilibre. Et non, je n'arrêterai pas !
    Quoi qu'en disent les toubibs bien pensants avec leurs théories fumeuses, c'est le cas de le dire.
    Pourquoi je vous dis ça ? Ben de temps en temps, il m'arrive de lire la page d'accueil d'OB, en attendant que la connexion veuille bien se faire.
    Et là, j'ai vu un truc sur la cigarette électronique. Alors, bien sûr, je suis allée voir, et de lien en lien, je suis tombzée sur un ramassis d'âneries gouvernementalo-laboratoiresques ..............
    Sisisi, allez voir.
    Et puis je sors de chez mes beaux-parents, et mon beau-père qui est sourd comme un pot et qui radote comme c'est pas permis, m'a répété  30 fois en 5 minutes "et vous avez pas encore arrêté de fumer ? Vous devriez ! Regarde moi, j'ai arrêté il y a 30 ans! " Ben merci, voilà le résultat !!
    Qui n'a fait que me conforter dans ma décision : je fume !
    Le prix, me direz-vous ? Ben je répète : je sors pas (hop, les 10€ d'entrée en boite), je bois pas (hop, les 5€ pour un picrate tout juste buvable), n'achète pas de fringues (hop les 50€ de pompes, 90€ de jeans - mon Levis, il a 30 ans!!! etc.) ne me maquille pas -parce que je le vaux bien (hop les cochonneries qui ont fait mourir des milliers de rats et autres chats et chiens volés à leurs légitimes propriétaires, pour que les fashion addict puissent se tartiner la figure), et puis on n'est pas loin de l'Espagne.... alors je fume !
    Et j'aime ça.
    Et pi, je suis pas la seule : Alexandre Dumas, en personne, disait :
    " En fumant, vous abrégez votre vie, me dit-on. Je fume depuis l'âge de dix-huit ans, j'en ai soixante-cinq, si je n'avais pas fumé, j'en aurais soixante-dix. Je serais bien avancé !"
    Sans compter qu'en fumant, je fais acte de citoyenneté : j'engraisse l'état, qui s'en met quand même plein les fouilles sur le dos des tabagiques, tout en nous disant hypocritement d'arrêter, sous prétexte de préserver notre santé !
    Alors ?




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  •   Pour le casse-tête de Dana

    Je réédite ce billet, paru dans les ancienne Humeurs, aujourd'hui disparues., pour exliquer à mes proches restés en France pourquoi j'aimais tant vivre au loin.......

    Et il reste pour moi l'image parfaite de plein de ces petis bonheurs qui font une vie douce.....

    Elle rêve qu'elle vit dans un monde de couleurs, de soleil, de chaleur, de paix.

    Elle rêve que la lumière est douce, que le soleil ne la brûle pas.

    Elle rêve que les nuages ne sont jamais, ou très rarement, menaçants.

    Elle rêve que ses chiens vivent en liberté, qu'elle a remisé les laisses et autres instruments au placard. Elle rêve    que pas un policier ne lui demandera jamais leurs papiers, et qu'enfin elle peut aller se promener suivie de sa meute sans l'appréhension de l'amende ou de la plainte du voisin malveillant.

    Elle rêve que le matin, en ouvrant les yeux, un rayon de soleil perce entre les lattes mal jointes de sa cabane.

    Elle rêve qu'elle regardera en l'air et qu'elle verra, à travers un voile de tulle blanche, la paille du toit enroulée autour des bâtons de bambou et des branches taillées de l'aloès.

    Elle rêve qu'elle entend le piétinement des pattes des martins sur le toit, et leurs cris, mélange des bavardages de la pie et des cris des autres oiseaux qu'ils imitent. Elle rêve que Faranazy; le chauffeur,  ira, bientôt, lui dénicher un de ces cousins des mainates et qu'elle l'apprivoisera.

    Et que sa réputation de sorcière s'affirmera quand elle partira dans le village suivie de son oiseau. C'est vrai, elle est un peu sorcière : elle parle aux chiens et ils lui répondent, lui obéissent. Elle chasse le feu de la brûlure en passant les doigts dans ses cheveux. Son chat, le petit O'Malley lui parle et elle le comprend, elle lui répond : oui, O'Malley, je sais que tu as faim, voilà un bout de gras. Et, tout le monde le sait, les sorcières ont toujours des chats auxquels elles parlent.

      

    Elle rêve qu'elle va s'asseoir devant la grande table en bambou dans le jardin, à l'ombre des lauriers, et lire tranquillement en écoutant les bruits du village : les clochettes au cou des zébus, les cris des enfants, le roulement des charrettes, les klaxons des taxi-brousse, les chants dans l'église voisine, les grands éclats de rire des femmes de chambre, les chansons dans la cuisine, le pépiement d'Oli, la serveuse, dans le restaurant.

     

    Elle rêve que Jaurès, le génial bricoleur, passera à côté d'elle en traînant les pieds, et en balançant négligemment entre deux doigts un madrier qu'elle aurait du mal à porter, qu'il lui dédiera un grand sourire, et qu'elle fondra en le regardant : il ressemble tellement à son fils resté en France. 

    Elle rêve qu'en levant les yeux de son livre elle verra une explosion de couleurs : le rose profond des lauriers, le rose indien des hibiscus, l’orange presque aveuglant des flamboyants, qui portent si bien leur nom, le rouge du sable sur le sol, les aloès fleurissant en grappes d'un orangé profond, au dessus de leurs grandes feuilles bordées d'épines, les grenades mûrissent, grosses boules d'un rouge brun au milieu des branches épineuses.

    Elle rêve que depuis la terrasse du restaurant, son regard, au-delà de la clôture en branches, accrochera les toits en vondro (prononcer voundrou, sorte de grands joncs dont on fait les habitations traditionnelles, dans son pays imaginaire),

    les grands kily (tamariniers) dont les branches bruissent sous l'alizé de la marée montante.

    Elle rêve que deux gamins font une course avec leurs charrettes tirées par des zébus, qu'ils passeront en soulevant des nuages de poussière, que Boxy se lancera à leur poursuite en aboyant et que ca ne la dérangera pas.

    Elle rêve qu'elle va à la bibliothèque du village (merci, Claire, pour la photo) , par la route bordée de filaos,les pieds dans la poussière et qu'elle regarde en passant les petits étals des femmes du village qui proposent à la vente une bassine de haricots, un plat de boko boko, ces succulents beignets, des assiettes pleines de plaques de nougatine fabriquée au miel de baobab et aux arachides fraichement grillées. Elle craque, elle en achète une, et en léchant ses doigts poisseux, elle pensera qu'il faudra en faire griller, des arachides, justement, en rentrant. Elle rêve qu'elle regarde les étalages des fripiers et qu'elle achètera un T-shirt 10 fois trop grand, mais au coton usé si doux et aux fleurs aux couleurs fanées si, si presque irréelles.

    Elle rêve qu'elle croisera deux fillettes qui sortent de l'école, dans leurs tabliers à petits carreaux bleus et blancs, qu'elles la regarderont en chantonnant "bonzour madame" et qu'elles s'enfuiront en riant quand elle leur répondra, leurs petites tresses tressautant sur leur tête au gré de leur course.

    Elle rêve qu'elle va prendre le chemin qui part en face de chez elle, avec ses chiens, et qu'au bout de 250 mètres, elle va jeter des coquilles de noix de coco dans la mer pour faire jouer sa chienne, et qu'Oscar, du haut de ses 6 mois, couinera en essayant d'éviter les vaguelettes qui viennent mourir devant ses pattes, sans oser se jeter à l'eau, cependant que Boxy, souverain, les toisera d'un air de profond mépris avant de reprendre le chemin de la maison, royal, la queue en trompette .

    Elle rêve qu'elle comprend les gens d'ici, dont on dit qu'ils sont incapables de voir plus loin que la fin de la journée en cours.

    Mais pourquoi essayer de voir au-delà du moment présent, au lieu de prendre le temps de l'apprécier pleinement, de goûter à la paix et à la douceur de vivre ?



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